En réussissant le pari fou de se hisser à la 3e place de la Swisspeaks 360, Emily Vaudan prouve qu’il faut désormais compter sur elle également sur les (très) longues distances. Pour une première participation à la fameuse course qui traverse le canton, la traileuse du Val de Bagnes se lançait sur le parcours de 314 kilomètres pour 22’800 m D+/ 24’000 m D-, avec l’espoir prioritairement de connaître la joie de passer la ligne d’arrivée au Bouveret. Vendredi dernier, elle a pulvérisé ses attentes, en réalisant un chrono spectaculaire de 89’06 heures.
Nos superlatifs n’auront jamais la force ni la saveur de ce que vient de vivre la championne du Val de Bagnes. » Difficile d’expliquer ce que je ressens…C’est une course que tout traileur devrait vivre. C’est magique. » Des étoiles encore plein les yeux (celles du Valais qu’elle vient de traverser depuis Bettmeralp jusqu’au Bouveret) , à peine fatiguée, Emily Vaudan relate avec émotion le périple qu’elle vient de réaliser la semaine dernière durant 4 jours et 4 nuits de marche quasi ininterrompue: » Je n’ai pratiquement rien dormi, à part quelques turbo siestes. J’ai juste continué de marcher sans trop me poser de questions, même dans les moments difficiles comme sur la descente du Val d’Arpette. » Le genou gonflé qui la chicané sera vite relégué aux oubliettes, grâce à un mental d’acier, la clé de la réussite: » J’ai décidé que j’allais jusqu’au bout. J’ai aussi pensé à tous ceux qui ont des problèmes de santé. La question ensuite ne s’est plus posée. »
Le Valais dans la poche !
Emily a traversé le Valais comme ça : un pas après l’autre, confiante, humblement : « Je ne m’étais jamais aventurée sur du si long, je ne savais donc pas à quoi m’attendre », commente Emily qui avait toutefois obtenu une troisième place sur les 111 kilomètres de la X-Alpine du Trail Verbier Saint-Bernard l’an dernier. « Le triple de distance, c’est quand même autre chose: cela ne représente pas la même gestion de course. » Partie « la fleur aux baskets », exaltée par un départ qui allait la mener sur les « hauts sentiers valaisans » , la traileuse s’emballe. Pendant plus de 225 kilomètres jusqu’à la descente du Col Fenestral, elle fera la course en tête, poursuivant l’unique dizaine d’hommes qui la devançaient : « On me disait le long du parcours, aux ravitos aussi, que j’étais la première femme. J’avais de la peine à y croire. Puis, je me suis dit que j’étais peut-être partie un peu vite… » Rattrapée par la Suissesse Anita Lehmann qui allait remporter la course, puis la française Claire Bannwarth (2e), Emily ,diminuée, tint bon jusqu’au finish : « Je ne pouvais pratiquement pas courir les descentes, c’est pourquoi j’ai perdu pas mal de temps. Mais j’ai continué. «

« C’est quand la prochaine Swisspeaks? »
Vendredi, à son arrivée au Bouveret, après avoir ralenti quelque peu pour permettre à son staff de ravitailleurs de la voir arriver, elle a mesuré l’ampleur de l’exploit: « J’ai eu du mal à retenir mon émotion. Surtout de pouvoir partager ces moments avec mon copain, ma famille et mes amis qui m’avaient soutenu tout au long de cette aventure. » Dimanche aussi, lors de le remise des prix, Emily ressent une grande joie de faire partie de cette belle famille de l’ultra trail: « Ils appelaient les finishers dans l’ordre inverse d’arrivée; je me suis retrouvée sur la scène avec les meilleurs hommes. Etre parmi ces tout grands de la discipline, qui ont entre autres plusieurs Thor des Géants à leur actif, ça m’a vraiment émue. » Et aussitôt ôté la fatigue et les « bobos » physiques qui s’envoleront complètement avec la phase de récupération: « Vendredi, je ne m’imaginais pas refaire ce truc de fous. Le lendemain, je ne disais déjà plus non et dimanche je regardais déjà sur le site les dates pour 2021. »
Romy Moret