Jean-Marie Michellod et François Luisier : frères de collection

Parmi les dix collections privées que présente le Musée de Bagnes au travers de son expo intitulée Musée sauvage, le visiteur peut découvrir celles des deux Bagnards Jean-Marie Michellod et François Luisier. Se côtoyant depuis l’enfance, ces derniers ont non seulement partagé leurs jeux de gamins dans le village de Versegères, comme la fabrication de petites vaches en bois et de frondes redoutables ou la découverte mythique de la télévision qui a chamboulé certaines habitudes ludiques, mais également un intérêt naissant pour l’art de collecter, qui a démarré à l’épicerie d’Albert Besse avec les fameuses vignettes des chanteurs de l’époque. Frères d’armes, de cœur et de passion, les deux compères ont grandi ensemble au rythme de leur passion croissant aussi vite que livres, cartes postales et autres objets anciens s’accumulaient chez eux. Une relation forte faite de connivence, complicité et sentiment d’appartenance unit deux hommes, investis d’une identique mission qui   transcende le but ultime de la collection, en mettant en lumière la beauté simple mais puissante de la relation qu’ils entretiennent chacun avec les objets qu’ils possèdent.

La collection se fait jeu et amour

« Cette passion a pris de l’ampleur comme un boule de neige », image Jean-Marie : d’une première carte postale s’en suivit un cortège ahurissant d’autres cartes, documents et archives : « Des cartes ? je dois bien en posséder des dizaines de milliers » , fronce les sourcils Jean-Marie, juste avant que François ne mette un terme à sa réflexion : « Aucune idée ! Quand on aime on ne compte pas. » Oui, Jean-Marie et François aiment les objets collectés, pour leur utilité, leur rareté, leur façon de raconter un passé qui ainsi subsiste  : « Les cartes postales sont les témoins simples d’une réalité passée. Elles démontrent à elles seules toute l’évolution d’un village au fil des ans. » L’attrait intellectuel un peu certes, mais surtout l’amour irrationnel, pour la beauté du geste et le cœur qui palpite : « Je me suis fait happer par cette passion, comme par un jeu captivant ; c’est de l’ordre du défi de trouver certaines archives rares et accumuler les cartes. » Un défi permanent de ne laisser aucun indice ou pièce manquante du puzzle échapper à leur vigilance, cette quête se transformant au fil des ans en mission comme pour Willy Ferrez, qui déclarait peu avant sa mort lors d’un entretien avec Mélanie Hugon-Duc, commissaire du Musée de Bagnes : « Je sens que je dois réunir les choses en un même endroit. » L’ancien président de Bagnes, également collectionneur de documents et archives de sa région alpine, avait écouté son intuition éveillée par les faits et gestes de sa mère qui prenait soin des objets pour l’importance de leur signification : « L’objet est non seulement utile, mais a une histoire. Il est témoin d’une période. Je ne me les accapare pas, je mets plusieurs choses ensemble pour donner du sens, car l’ensemble parle plus qu’une chose esseulée. » Avec ces mots de Willy Ferrez, l’on s’est peut-être rapproché du sens profond qui anime l’art de collecter.

Un véritable lien presque palpable unit l’homme à l’objet : « C’est l’objet qui nous choisit » analyse François Luisier, qui admet volontiers qu’il lui parle : « C’est difficile à exprimer ce que je ressens. »

Si de cartes postales anciennes, de livres et d’objets anciens tels que tisanières, chiens du Saint Bernard ou vaches en bois qui ornent les étagères des maisons des deux Bagnards se comptent en milliers, ces objets n’en demeurent pas moins accessibles à qui voudrait bien y poser un œil curieux : « Nous sommes des collectionneurs atypiques dans le sens où nous ouvrons nos collections. Nous avons du plaisir à les montrer, à partager nos connaissances avec les gens. Surtout, nous ne faisons pas ça pour gagner de l’argent, car elles ne nous rapportent rien. »

Jean-Marie Michellod et François Luisier posent avec Mélanie Hugon-Duc au Musée de Bagnes dans la pièce reproduisant la chambre de Willy Ferrez : « La plus belle carte postale est celle qu’on n’a pas. »

Jean-Marie Michellod et François Luisier exposent chacun leurs collections privées au Musée de Bagnes. Celles-ci font ainsi partie des dix collections privées que le visiteur peut découvrir dans des pièces qui leur sont dédiées. En effet, «Musée sauvage» présente dix collections privées dédiées aux kimonos, vins jaunes, tableaux, sculptures, à la musique métal, à la pratique de la course à pied, etc. Des visites guidées en compagnie de leurs propriétaires, plusieurs événements et une publication accompagnent l’exposition. Toutes les infos sur : www.museedebagnes.ch

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